Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité est selon le DSM-V, un trouble neurobiologique caractérisé par soit un déficit de l’attention, soit une hyperactivité et une impulsivité, mais le plus souvent, les deux.
Dans cet article, je vous propose de regarder le TDAH sous un angle différent, non pas sous l’angle d’un trouble, mais bien comme un fonctionnement cognitif qui diverge de la norme.
Le terme « déficit » d’attention porte beaucoup à confusion. Ce terme laisse sous-entendre que la personne est incapable de porter attention ou seulement sur une très courte période. Mais quand on s’attarde au fonctionnement interne d’une personne qui a un « TDAH », l’attention n’est pas manquante, au contraire.
Nous remarquons souvent que la personne a de la difficulté à maintenir son attention sur des aspect qu’elle trouve ennuyeuses ou répétitives. Et à l’inverse, nous remarquons que la personne peut avoir un très grand niveau d’attention et de concentration sur des choses qui l’intéressent et qui la passionnent. Pour ces raisons, nous entendons parler de trouble de régulation de l’attention.
Cela dit, une des lois neurobiologiques de l’apprentissage est de pouvoir apprendre selon ses motivations et ses intérêts personnels. La connotation émotionnelle est un besoin fondamental. Se pourrait-il que pour certaines personnes, les passions, les intérêts et la motivation intrinsèque soient plus importante que pour d’autres afin de maintenir une attention soutenue?
N’oublions pas que l’attention est avant tout un réflexe de survie qui est une ouverture de nos sens à tout ce qui se passe à l’extérieur comme à l’intérieur de notre corps. Thom Hartmann a fait une comparaison intéressante pour illustrer l’attention distinctive des personnes ayant un « TDAH ». Leur attention fonctionne comme un radar à balayage. Ces perçoivent et reçoivent une quantité importante de stimuli. Ainsi, l’observation de l’environnement, d’un objet ou d’une image se fait point par point. Ils ont pleinement conscience de leur environnement en entier.
Les personnes qui ont un TDAH sont hypersensibles et elles sont donc un fonctionnement perceptif prédominant. Leurs frontières interpersonnelles sont souples. Elles ont la capacité de voir le portrait global d’une situation avec l’ensemble des détails, même ceux qui passent généralement inaperçus pour la majorité des gens. C’est ainsi qu’il devient pour eux, extrêmement difficile de percevoir qu’une seule chose à la fois et de s’y concentrer, s’il n’y a pas d’intérêt pertinent de le faire. Leur cerveau dirige leur attention vers ce qui est jugé important pour la survie. Si rien n’est prioritaire, leur attention continue de balayer l’environnement. Ces personnes perçoivent ainsi la globalité de leur environnement de manière très complexes. Elles sont sensibles aux bruits ambiants, à la lumière, aux mouvements des gens, etc. Elles voient et ressentent tout, constamment. C’est tout autant un défi et qu’une force.
Il est donc faux de croire que la personne ayant un « TDAH » ne perçoit pas les détails ou n’y prête pas attention. C’est totalement l’inverse. Et, lorsque nous avons cette capacité de percevoir tous les détails d’une situation, il devient extrêmement difficile de rester concentrer sur une seule chose précise à un moment précis.
La difficulté de ce neurotype réside principalement du fait que l’environnement, particulière l’environnement scolaire, est très peu adapté à cette neurologie. L’enseignement et les salles de classe sont pensées et conçu par rapport à la norme. Cette hypersensibilité et cette intelligence perceptive les amènent à être plus facilement décentrer par leur environnement et c'est à ce niveau que nous pouvons travailler avec eux.
En se basant sur le modèle d’attention déficitaire, les stratégies qui sont couramment offertes servent à pallier ce « faux déficit ». Ainsi, ces stratégies, en plus de faire fausse route sur la compréhension du « TDAH », ne sont pas du tout adaptées à cette neurologique. Plutôt que d’apprendre à la personne comment son cerveau fonctionne et de respecter son fonctionnement, nous travaillons contre sa neurologie, en mode compensatoire. Les méthodes comportementales utilisées actuellement encadrent la personne de manière stricte. On instaure souvent un système de récompenses pour motiver l’enfant, on impose des limites, des plannings à respecter, on tente de le structurer au maximum. Or, à la base, le « TDAH » n’est pas un trouble de comportement, il n’y a donc rien à corriger ou à améliorer à ce niveau. Les méthodes comportementales essaient également de compenser le « déficit attentionnel », en ayant comme objectif d’amener la personne à avoir une attention standard (normale) plutôt que de comprendre comment fonctionne son attention.
Si on contraire, on apprend à la personne ayant un « TDAH » comment fonctionne son cerveau, on peut s’adapter à sa manière d’aborder les travaux scolaires par exemple, les tâches quotidiennes, les rapports sociaux, etc. Les personnes ayant un « TDAH » sont les mieux placées pour comprendre leur propre mode d’apprentissage. Il est donc essentiel de leur faire confiance, même si cela semble complètement farfelu. C’est en misant sur ses intérêts, sa créativité, en les laissant elles-mêmes explorer ce qui leur convient le mieux qu’elles parviendront à mieux se définir, à mieux se connaitre, à comprendre leur neurologie et à en tirer profit.
Lorsque la personne a un concept de soi mieux défini et des intérêts personnels qui soulèvent la passion, sa motivation incroyable se soulève et elle peut mettre à profit sa capacité de de grande concentration d’où peuvent immerger plusieurs nouvelles idées créatives. L’hyperfocalisation est une force incroyable souvent banalisée et parfois même ignorer lorsqu’on aborde le TDAH.
Nous pouvons donner des outils à la personne afin qu’elle puisse mieux gérer son attention de manière autonome, sans être constamment cesse éparpillée. Nous pouvons également l’accompagner afin de clarifier son concept de soi en l’aidant à prendre conscience de ses intérêts et passions. On ne peut pas parler de « déficit » d’attention puisque celle-ci n’est ni absente, ni inférieure, ni déficiente. Il y a seulement un cerveau qui fonctionne de manière différente : une variation génétique du traitement de l’information.
Mélanie Ouimet, Fondatrice du mouvement francophone de la neurodiversité et collaboratrice experte en autisme