L’apprentissage de la propreté est un concept parfois laborieux à comprendre pour les autistes. Il faut savoir en premier temps que l’autisme n’empêche pas la propreté.
Si une personne autiste est aux couches à un âge très tardif, ce n’est pas l’autisme la cause, mais l’incompréhension de l’autisme qui prive l’autiste d’assimiler le concept de la propreté.
Lorsqu’on essaie d’apprendre à un enfant autiste la propreté, nous avons tendance à l’encourager avec un système de récompenses. Premièrement, nous oublions que la propreté d’un autiste peut arriver un peu plus tardivement que la moyenne et que c’est indépendant de la volonté de l’enfant. Il ne sera donc ni rare ni anormal qu’un enfant autiste de 4-5 ans, parfois un peu plus, porte des couches.
Mais surtout, plusieurs ignorent que parfois, l’enfant autiste n’a pas conscience de toutes les parties de son corps. Il ne sait pas qu’il a une vessie et ne fait pas le lien entre le liquide par terre et son corps qui vient d’éliminer son pipi. Il ne sait pas intuitivement qu’il faut faire ses besoins seulement dans la toilette et non dans ses culottes ou sur le plancher. Il ne sait pas qu’il peut faire ses besoins ailleurs que dans la toilette de sa maison. Il ne sait pas qu’il peut aller faire pipi quand il ressent seulement une petite envie non urgente, ce qui permet d’éviter les accidents. Il ne sait pas qu’il ne peut pas faire ses besoins dehors comme les animaux. Il ne sait pas que la sensation qu’il ressent dans son corps est en lien avec l’élimination de son urine ou de ses selles. Ce sont tous des exemples de pistes à explorer qui, si nous l’ignorons, peuvent empêcher l’enfant autiste d’acquérir la propreté.
L’enfant autiste peut également avoir besoin qu’on lui explique tout le processus d’élimination des déchets biologiques pour comprendre logiquement le concept de propreté. Il faut généralement être très explicite avec les autistes pour qu’ils puissent acquérir et bien comprendre de nouveaux concepts comme celui de la propreté. Il ne faut pas hésiter à prendre du papier et des crayons pour dessiner ou mieux encore, lui montrer par l’exemple ! Et ce, même si l’enfant est non verbal, il comprend.
Par ailleurs, il n’est pas rare d’entendre que les autistes jouent dans leurs excréments et font de jolies œuvres d’art sur les murs ! Encore une fois, ce n’est pas la condition autistique qui génère cette problématique ou une déficience intellectuelle associée à l’autisme. Certains jeunes enfants, autistes ou non autistes, expérimentent le plaisir de jouer dans leurs selles. Pour les enfants, les selles ne sont pas sales et ils n’ont pas encore l’émotion de dégoût associée à leurs selles. Ce comportement fait partie du développement des enfants et s’étend parfois plus longtemps pour les autistes, pour qui le plaisir passe par le sensoriel avant le social.
Cependant, pour certains autistes, parfois, cette phase perdure et il est important d’aider la personne autiste à comprendre que les selles ne sont pas propres. Par le même principe, la personne autiste n’a pas nécessairement la conscience naturelle et innée que les textures brunes qui se retrouvent dans sa couche ou par terre sont ses excréments. Ils ne peuvent pas savoir et comprendre que « ce n’est pas propre et qu’il y a plusieurs bactéries nocives pour leur santé ». Ils ont besoin d’avoir une explication claire et logique. Et parfois, selon l’âge chronologique, ce principe logique ne peut être compris, que l’on soit autiste ou non. Ce n’est pas un signe de déficience quelconque lié à l’autisme.
Les autistes sont des êtes perceptifs. L’abstrait est complexe pour eux. Il faut revenir à la base et s’assurer avant toute chose que l’enfant autiste ressent ses sensations internes et qu’il a bien conscience de son corps et de ses frontières entre lui et son environnement.
Plus l’enfant grandira, plus il sera en mesure de comprendre et d’assimiler le concept lorsqu’on lui explique concrètement et non en le motivant par des systèmes de récompenses car on court le risque que l’autiste demeure aux couches toute sa vie ou qu’il ne sache pas généraliser ce concept comme bien d’autres d’ailleurs.
Mélanie Ouimet, fondatrice du mouvement francophone de la neurodiversité, collaboratrice en recherche en autisme