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Le syndrome d’évitement pathologique des demandes (PDA) : l’anxiété et la réponse aux besoins internes chez les personnes neurodivergentes – partie 2

Les personnes neurodivergentes et à haute sensibilité sont ressentent souvent de l’anxiété. L’anxiété, même en l’absence de traumatisme, peut rendre difficile le ressenti et la réponse aux signaux internes, tels que la faim, la soif ou le besoin d’éliminer. Cette difficulté à ressentir les signaux corporels peut s’expliquer par plusieurs mécanismes.

Hypervigilance et difficulté à ressentir les sensations internes

Chez les personnes hautement sensibles comme les autistes, l’anxiété chronique peut provoquer un état d’hypervigilance constant. Ce phénomène peut amener la personne à être plus attentive à son environnement extérieur qu’à ses sensations corporelles. En raison de cette hypervigilance, les signaux internes comme la faim, la soif, le besoin d’aller aux toilettes peuvent passer au second plan, voire être totalement ignorés.

Des études sur l’anxiété montrent que le cerveau sous stress perçoit les signaux de l’environnement comme des menaces potentielles, activant ainsi le système nerveux sympathique, responsable de la réponse combat-fuite-figement-soumission. Cette activation rend difficile la reconnaissance des sensations corporelles et donc la reconnaissance des besoins physiques de bases, qui dépendent du système nerveux parasympathique, qui sont davantage lié à la régulation et aux fonctions de repos. Chez les neurodivergents, cette régulation est souvent plus ardue, ce qui exacerbe la difficulté à s’auto-réguler.

Le lien entre haute sensibilité et surcharge émotionnelle

Les personnes ayant une haute sensibilité vivent souvent une surcharge émotionnelle lorsqu’elles sont confrontées à des situations anxiogènes. Leurs réactions émotionnelles intenses peuvent brouiller la perception des signaux corporels. Cette surcharge émotionnelle peut provoquer des comportements d’évitement, où la personne, submergée par l’anxiété, ne répond plus aux besoins internes, comme manger ou boire.

La dissociation légère

Un autre phénomène qui peut expliquer ce manque de réponse aux besoins internes est la dissociation légère, un mécanisme de protection que certaines personnes, en particulier les neurodivergentes, peuvent adopter face à une anxiété persistante. Cela ne signifie pas une dissociation traumatique sévère, mais plutôt un détachement temporaire des sensations corporelles et émotionnelles. Lorsqu’une personne est anxieuse de manière prolongée, elle peut se détacher de ses sensations corporelles pour éviter de faire face à l’inconfort émotionnel. Ce processus peut empêcher la reconnaissance des besoins essentiels du corps.

Stratégies pour mieux répondre aux besoins internes

Pour aider une personne à ressentir ses besoins internes, il est important d’adopter des approches de régulation émotionnelle et corporelle. Des approches comme la pleine conscience (mindfulness) peuvent aider à reconnecter la personne à ses sensations corporelles en lui apprenant à prêter attention à son corps dans l’instant présent. Des interventions somatiques, telles que le yoga ou la relaxation progressive, peuvent aussi favoriser une meilleure conscience corporelle et aider la personne à reconnaître ses besoins internes, malgré l’anxiété. Et bien avant tout, un lien d’attachement sécurisant, avec un toucher si besoin, permet la co-régulation autant chez les enfants que les adultes.

L’anxiété peut donc influencer la capacité à répondre aux besoins internes chez les personnes neurodivergentes, sans nécessairement être liée à un traumatisme. Ce phénomène est amplifié par l’hypervigilance, la surcharge émotionnelle et, dans certains cas, une dissociation légère. Reconnaître ces dynamiques permet d’adapter les approches pour soutenir la personne à mieux comprendre et répondre à son besoin de sécurité intérieure, puis à ses besoins corporels.

Mélanie Ouimet, fondatrice du mouvement francophone de la neurodiversité et co-chercheuse en autisme

Si vous cherchez des sources scientifiques pour approfondir ce sujet, voici quelques références pertinentes :

• Aron, E. (1996). The Highly Sensitive Person. New York: Broadway Books.

• Porges, S. (2011). The Polyvagal Theory: Neurophysiological Foundations of Emotions, Attachment, Communication, and Self-Regulation. W.W. Norton & Company.

• Critchley, H. D., & Garfinkel, S. N. (2018). Interoception and emotion. Current Opinion in Psychology, 17, 7-14.