Dans notre société actuelle, il y a une tendance à vouloir faire avancer les étapes du développement des enfants, en particulier lorsqu’il s’agit de tâches comme tenir un crayon, découper ou même lire de manière précoce. Cette pression à atteindre des compétences précises de plus en plus tôt peut sembler bien intentionnée, mais elle ignore souvent les rythmes naturels de maturation physiologique et cognitive des enfants.
Le développement de la motricité fine : Un processus progressif
Le développement de la motricité fine, qui inclut des compétences comme la prise en main du crayon ou la découpe, n’est pas seulement une question d’apprentissage technique. C’est aussi une question de maturation physique. Avant l’âge de 7 ans, les mains des enfants ne sont tout simplement pas prêtes pour manipuler des objets de manière fine et précise. Les muscles, les tendons et les articulations des mains continuent de se développer et de se renforcer jusqu’à cette période. La coordination nécessaire pour saisir, appuyer et couper avec précision émerge naturellement avec la croissance physique et cognitive de l’enfant.
La pression imposée pour que les enfants accomplissent ces tâches à un âge précoce peut être contre-productive. En effet, un enfant de 5 ans, par exemple, ne possède pas encore la dextérité manuelle nécessaire pour bien tenir un crayon ou découper des formes complexes. Au lieu de se concentrer sur des compétences prématurées, il devrait être libre de jouer et d’explorer le monde avec ses mains, en développant d’abord des capacités motrices plus larges : grimper, sauter, pousser, tirer, etc. Il ne s’agit pas ici de ne pas leur offrir un environnement stimulant mais, plutôt que d’imposer des périodes de dessins ou de découpage en mettant une pression à bien tenir ces outils, nous pourrions simplement encourager la liberté d’exploration.
Le jeu libre : une clé du développement
Les enfants ont un besoin vital de jeu libre. Ce type de jeu leur permet de stimuler leur créativité, de renforcer leur coordination motrice globale et d’apprendre à interagir avec leur environnement de manière plus organique. Forcer les enfants à maîtriser des tâches comme le découpage ou l’écriture avant qu’ils n’y soient physiologiquement prêts peut nuire à leur plaisir du jeu et les amener à percevoir ces activités comme une source de frustration plutôt que d’amusement.
L’exploration libre et la manipulation d’objets variés, comme des blocs, de la pâte à modeler ou des tissus, aident à construire la base nécessaire pour les compétences plus fines. C’est en ayant l’espace et le temps de manipuler sans contrainte que l’enfant va développer une meilleure coordination et une meilleure maîtrise de ses mains.
Respecter le temps de développement
Je vous invite à respecter le rythme de développement naturel des enfants et de mettre l’accent sur le jeu et l’exploration libre. Les attentes précoces, comme celle d’attendre d’un enfant de 5 ans qu’il sache découper proprement ou écrire de manière lisible, peuvent créer une pression inutile qui nuit à son bien-être et à son épanouissement. Plutôt que de se concentrer sur l’acquisition rapide de certaines compétences, il est essentiel de leur offrir un environnement où ils peuvent s’épanouir à leur propre rythme. Cela inclut la possibilité de jouer librement, d’explorer, et de développer des compétences motrices de base avant de se lancer dans des activités plus complexes.
Les enfants n’ont pas besoin d’atteindre des objectifs de développement à un âge trop jeune pour réussir plus tard. Le jeu libre et respectueux de leur rythme naturel est fondamental pour leur épanouissement. Les parents, les éducateurs et les responsables de l’éducation devraient prendre conscience de l’importance de cette phase de développement et ne pas forcer les enfants à « grandir » trop vite. Le développement des mains et de la coordination, comme tant d’autres aspects du développement, se fera de manière plus fluide et harmonieuse si on laisse l’enfant jouer, expérimenter et grandir selon ses besoins et sa propre maturation.
Mélanie Ouimet, fondatrice du mouvement francophone de la neurodiversité et co-chercheuse en autisme