Ces garçons hypersensibles incompris

Ces garçons hypersensibles incompris

Les enfants qui ont une intelligence atypique (autistes, TDAH, DYS, HP) sont hypersensibles. Ils ont un grand besoin de sécurité. Ces enfants ont les sens extrêmement aiguisés. Le cerveau perçoit davantage de détails provenant de leur environnement. À noter qu’ils n’ont pas de problèmes d’intégration sensorielle. Il s’agit véritablement du cerveau qui est « branché » différemment et qui perçoit plus de stimuli. Les hypersensibles absorbent également tout comme des éponges hyper efficaces. Puisque le flot de stimuli est incessant, les hypersensibles doivent apprendre à gérer ces informations entrantes pour garder l’équilibre interne. Il est essentiel pour ces personnes, enfants ou adultes, d’évacuer, de trier, d’ordonner, de respirer, en bref, de faire de la place à l’intérieur de soi pour créer suffisamment d’espace intérieur pour affronter le quotidien. Pour les enfants hypersensibles, cette paix intérieure passe par la sécurité de leur environnement et donc, des liens qu’ils ont avec les adultes qui les accompagnent.

Dans un espace sécuritaire dans lequel l’enfant sera pleinement accueilli, il pourra déposer toutes les émotions intenses qu’il vit. Cultiver la vie émotionnelle et répondre au besoin de proximité est la clé de l’épanouissement des enfants hypersensibles, filles comme garçons.

Les garçons hypersensibles sont généralement mal compris. Leur mal-être se traduit souvent par des comportements perturbants comme l’hyperactivité, l’impulsivité, l’opposition, la provocation ou l’agressivité. Également, nous avons d’énormes préjugés quant à la sensibilité masculine. De manière générale, nous avons de la difficulté à répondre à leurs véritables besoins soit parce que nous ne décodons pas ces besoins ou soit parce que la croyance populaire invite à « endurcir » les garçons. Un petit garçon sensible qui a besoin de proximité, de câlins, de lien, d’exprimer ses émotions sera vite qualifié de « trooooop sensible! », voire de faible et d’inadapté. « Il va falloir s’endurcir un peu! », « Le monde est difficile, il ne te fera pas de cadeau! », « Ne sois pas si douillet, il faut être fort! ». Des phrases encore entendues trop souvent qui proviennent de cette croyance populaire qu’il est nécessaire, pour être fort, de se couper de nos émotions, de notre sensibilité, de la relation d’attachement pour affronter le monde dur dans lequel nous vivons et c’est encore plus vrai pour les garçons. Or, ce que nous encourageons, ce sont des habitudes de vie qui distendent le lien, qui nous éloignent de l’empathie, de la collaboration et de la communication.

Kate Stone Lombardi aborde cette thématique spéciale dans son livre intitulé : Le mythe du garçon à maman : pourquoi garder nos fils proches les rend plus forts[1]. Ce livre révèle des recherches intéressantes qui nous amènent à réfléchir sur notre manière d’éduquer les garçons, particulièrement les hypersensibles. Les relations de proximité nourrissent les garçons et contribuent à leur plein épanouissement. À l’inverse, des comportements dérangeants, de l’anxiété de séparation et de la détresse surviennent lorsqu’ils sont poussés à une séparation précoce et que leurs émotions ne sont pas entendues.

Fait intéressant également. Les garçons hypersensibles sont plus susceptibles de vivre de l’anxiété de séparation que les filles hypersensibles. L’anxiété de séparation se comble par le lien. Hé oui! Contrairement à la croyance populaire qui affirme que l’enfant doit apprendre à supporter la séparation d’avec ses figures d’attachement pour arrêter son anxiété, c’est en solidifiant le lien et en répondant aux grands besoins de lien que le sentiment de sécurité intérieur de l’enfant prendra de l’expansion.

Dans son livre, Lombardi mentionne que les liens proximaux avec les garçons les soutiennent à chaque étape de leur développement. En lien, le développement de leurs compétences socio-émotionnelles est favorisé. Ainsi, ces garçons arrivent à mieux communiquer leurs émotions et leurs besoins. Ils s’épanouissent alors mieux au niveau académique également. Leurs comportements dérangeants s’estompent. Ils sont moins susceptibles de développer des comportements à risque une fois arrivés à l’adolescence. À l’âge adulte, ces hommes collaborent mieux en milieu de travail et deviennent des leaders plus efficaces. Ils deviennent également de meilleurs conjoints et pères puisqu’ils ont su développer de bonnes capacités de communication, d’empathie et leur grande sensibilité s’est déployée de manière optimale.

Nos émotions, notre sensibilité sont l’essence de ce que nous sommes. Elles expriment nos besoins les plus profonds nécessaire à la connaissance et à l’expression de Soi. Alors, qu’est-ce qui fera de nos garçons en développement deviendront des hommes solides, capables de s’affirmer avec douceur, de tenir compte de leurs besoins et de ceux d’autrui, d’exprimer leurs émotions de manière respectueuse? Que voulons-nous pour nos garçons? Que voulons-nous pour nos enfants? Quel avenir et quel monde souhaitons-nous qu’ils aient? Pour quel avenir nous les accompagnons dans leur parcours développemental?

Mélanie Ouimet


[1] Kate Stone Lombardi, The mama’s boy myth Why keeping our sons close makes them stronger, Avery Trade, mars 2013

Ces comportements qui nous désarçonnent

Ces comportements qui nous désarçonnent

En tant que parent, il est souvent difficile de comprendre les comportements « excessifs » et « énervants » qu’adoptent nos enfants. Nous avons tendance à interpréter rapidement ces comportements comme étant des manifestations d’opposition, de provocation, de mauvaise volonté, d’insolence. 

Souvent, par manque de ressources, d’informations et d’outils, les parents deviennent de plus en plus rigides et punitifs et un climat autoritariste s’installe dans la maison. Les parents souhaitent ainsi modifier rapidement les comportements inadmissibles de leur enfant. La crainte d’élevé un enfant capricieux ou violents qui n’ira pas au bout de son potentiel est présente dans l’esprit de bien des parents. 

Si nous prenions un peu de recul face à nos propres sentiments et que nous regardions la situation plus objectivement. Ces comportements qu’adoptent nos enfants sont tous des messages à décoder provenant bien souvent d’un débordement émotionnel. Des émotions trop fortes pour la maturité cérébrale actuelle d’un enfant. Les enfants ont besoin du soutien d’un adulte pour s’autoréguler, c’est essentiel à leur développement émotionnel, affectif et social. 

Les cris et les punitions nous éloignent et abîment progressivement la relation que nous avons avec nos enfants. Et surtout, l’estime de soi de l’enfant s’amenuise et son amour propre s’estompe. L’enfant refoule ses émotions au plus profond de lui. Parfois, ses émotions explosent en d’autres « mauvais comportements » physiques ou verbaux. 

« Tu es méchante ! » « Je te déteste » « Tu n’es plus ma mère ». Le cycle d’agressivité et de provocation s’accentue. Pour d’autres, l’affirmation à la punition est immédiate. L’enfant s’affirme encore plus fort en s’opposant, en hurlant, en insultant, en étant plus insolent, en brisant des objets, etc. Une rage au ventre le ronge et il prend tous les moyens qu’il possède pour montrer qu’il existe car ses besoins ne sont pas entendus. 

Or, ces conflits sont souvent évitables lorsque nous sommes disposés à accueillir les émotions de nos enfants et que nous avons conscience de leur rythme de maturation cérébral. Ces comportements que l’on juge inacceptables ne sont pas dirigés contre nous et ne sont pas le résultat d’un manque de discipline ou d’autorité. Pour s’affranchir de cette émotivité, les enfants ont besoin d’une présence empathique et d’amour. Ils ont besoin d’être guidés et accompagnés quotidiennement. Graduellement, l’enfant apprendra à comprendre et gérer ses ressentis et à s’exprimer de manière respectueuse envers autrui. 

En tant que parents, il nous est souvent difficile de demeurer calme dans ces situations pour lesquelles nos enfants sont si intenses. N’hésitons pas à dire notre ressenti à notre enfant. Les besoins de tous peuvent être reconnus lorsque nous admettons que nous sommes dépassés pour le moment mais qu’ensemble, nous allons trouver une solution. Pour se sentir en confiance et pour ouvrir un dialogue réciproque, les enfants ont besoin d’avoir une personne authentique et non d’un parent « parfait ». Pour reconnaitre et accueillir les émotions intenses de nos enfants, nous devons avant tout s’avoir reconnaitre et accueillir les nôtres sans jugement. Nous évoluons avec nos enfants et nous cheminons à leur côté.  


Mélanie Ouimet

TDAH: comprendre et favoriser l’estime de soi

TDAH: comprendre et favoriser l’estime de soi

Éparpillé, décentré, agité, impulsif, rêveur, colérique, oppositionnel sont des qualificatifs péjoratifs et dévalorisants souvent décrits pour parler d’une personne ayant un TDAH. On observe, on appose des étiquettes et on instaure un plan d’intervention. Les approches traditionnelles, outre la médicamentation, concentrent leurs efforts sur des thérapies comportementales qui se caractérisent par un programme d’encadrement et de surveillance. On établit avec l’enfant des objectifs et des récompenses dans l’objectif d’obtenir de celui-ci de meilleurs comportements et résultats. Cependant, ces deux méthodes omettent l’essentiel : la perception et le vécu intérieur de la personne ayant un TDAH. 

Par ailleurs, la faible estime de soi est souvent remarquée chez les personnes ayant un TDAH. A priori, il est facile de faire le lien entre les difficultés et les échecs rencontrés et la faible estime de soi. Cependant, cette relation de causes à effet est trop simpliste. 

Pour comprendre les comportements et réactions des personnes ayant un TDAH, il est essentiel de connaître leur fonctionnement interne. La grande sensibilité que possèdent les personnes avec une attention modulaire est un élément clé dans cette compréhension. Leur frontière interpersonnelle est en effet très souple et perméable à l’environnement qui les entoure. Ainsi, de par cette grande hypersensibilité, les personnes ayant un TDAH perçoivent et ressentent l’ambiance et les émotions d’autrui très fortement tant et si bien qu’il est difficile, voire impossible, de faire la distinction entre leurs propres émotions et celles des autres. Le chaos interne s’installe donc facilement. 

Les personnes ayant des frontières interpersonnelles si perméables se retrouvent rapidement désorganisées et en surcharge sensorielle. C’est ainsi que, facilement, nous les jugerons et blâmerons d’être lunatiques, d’avoir l’esprit ailleurs, d’être paresseux, d’être distraits, d’être brouillons ou d’être rêveurs. Alors que leur besoin immédiat est simplement d’avoir un endroit calme pour se ressourcer et se recentrer sur elle-même.

Les frontières interpersonnelles souples jouent également un rôle sur le plan émotionnel. La tolérance à la frustration est généralement basse. On remarque des comportements impulsifs et oppositionnels. Ainsi, les parents, souhaitant mettre fin à ces « mauvais comportements », peuvent se retrouver dans un cycle sans fin d’argumentation, de punitions, de conséquences et constater que leur enfant semble complètement indifférent. 

Les punitions, les conséquences ainsi que les méthodes de renforcements positifs ne sont pas des solutions efficaces et concrètes et ne font qu’accentuer la mauvaise estime de soi d’une personne qui ne sait pas bien se définir soi-même. Gardons en tête: derrière chaque comportement se cache une émotion, un sentiment, une sensation qui est nécessaire de décoder. 

Par leur concept de soi mal défini, les sentiments d’ennui, de honte, d’incompétence, d’embarras, de solitude, d’incompréhension, etc. sont souvent ressentis chez les personnes ayant un TDAH et ces sentiments jouent un rôle majeur dans l’état d’agitation, de dispersion, d’impulsivité et de frustration observé chez ces personnes. Il est ainsi important d’accueillir cette expression maladroite sans jugement et sans punition et d’y apporter, par la suite, des outils pour aider la personne à mieux se comprendre et s’exprimer dans le futur. 

Le développement d’un lien d’attachement et de sécurité au sein de la famille est à la base du développement d’une bonne estime de soi. L’écoute empathique sans jugement permettra à la personne de se sentir aimée et accueillie pour ce qu’elle est. Décrypter le sens des comportements et paroles malhabiles : besoin d’écoute, besoin de considération, de se sentir aimé, de compréhension, de respect, de tendresse, de douceur, etc. Aider la personne à savoir mettre des mots sur son vécu, sur ses ressentis, décoder ce qui lui appartient de ce qui ne lui appartient pas. Il sera ensuite plus facile de gérer les stimuli environnementaux ainsi que les émotions des autres et par conséquent, de mieux se définir en tant que personne indépendante d’autrui : d’avoir un concept de soi plus clair. 

Une personne ayant un TDAH a souvent de la difficulté à se définir et les défis deviennent alors nombreux. La malléabilité de leurs frontières interpersonnelles rend extrêmement difficile le concept de soi, et par conséquent, l’estime de soi. C’est dans cette optique que les interventions devraient se concentrer. 

L’impact des succès, des échecs, des difficultés jouent un rôle dans l’estime de soi. Mais avant tout, l’estime de soi se bâtit sur la connaissance de soi, de ses désirs, de ses besoins, de ses capacités, de ses sentiments, etc. C’est en se penchant sur le fonctionnement interne de la personne ayant un TDAH que nous pourrons favoriser son estime de soi. Nous pourrons l’aider à mieux se définir, à mieux se connaître et ainsi favoriser sa capacité à reconnaître ses habilités, ses qualités, son sentiment de pouvoir et de compétence personnelle. Nous l’aiderons à mieux comprendre le fonctionnement de ses frontières interpersonnelles, à en réguler la perméabilité et à être conscient de ce qui lui appartient comme sentiment et émotions. Nous l’aiderons à atteindre son plein potentiel en toute confiance.


Mélanie Ouimet


Référence: Le TDAH, une force à rééquilibrer : Le trouble de l’attention avec ou sans hyperactivitéDiane Dulude, PH.D, Les éditions du CRAM et les éditions Porte-Bonheur.