Le deuil de l’enfant « parfait »

Le deuil de l’enfant « parfait »

Vos enfants ne sont pas vos enfants. Ils sont les fils et les filles de l’appel de la Vie à elle-même. Ils viennent à travers vous mais non de vous. Et bien qu’ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas.

Khalil Gibran

Le deuil de l’enfant parfait, celui dont nous avons tant rêvé et imaginé durant plusieurs mois, est encore un sujet tabou dans notre société. Une grande majorité de parents vivent avec plus ou moins d’intensité, une certaine ‘‘déception’’ vis-à-vis leur enfant. Certains espéraient une fille, d’autres un garçon, avec une telle morphologie et ayant un tel caractère. 

Or, l’enfant qui naît n’est que rarement comme nous l’avions imaginé. Parfois, il comble nos attentes et au-delà et parfois, il chamboule entièrement notre vision que nous avions de lui. Dans les deux cas, il y a matière à réflexion et introspection sur nos motivations personnelles en tant que parents.   

Les futurs parents s’imaginent la vie que leur enfant aura, s’inventent un parcours de vie qui leur ressemble ou qu’ils aimeraient avoir et le transpose sur l’enfant à naître : Un parcours académique, un choix de carrière, une vie familiale, etc. 

Pourtant, un enfant n’a pas à répondre aux critères, ni aux souhaites de ses parents. Il est essentiel que le parent parvienne à accepter son enfant tel qu’il est afin qu’il puisse s’investir affectivement avec son enfant. 

Le deuil de l’enfant rêvé est le résultat des attentes du parent et seul celui-ci a la responsabilité de ses émotions, de sa quête intérieure pour guérir ses blessures du passé qui sont des obstacles dans leur relation avec leur enfant. 

L’enfant, quel qu’il soit, n’est jamais responsable des émotions vécues par ses parents. 

Or, quand les parents ont un enfant différent, il semble normal et permis de crier haut et fort notre détresse en jetant le blâme sur cette différence. Il semble acceptable qu’un parent ressente colère, déni, tristesse parce que l’enfant est différent. Ce qui est entendu : l’enfant, avec sa différence, cause la souffrance de ses parents. 

Il semble permis d’exprimer notre souffrance personnelle et de la transposer sur ladite différence. 

Seulement, plusieurs personnes, ces enfants et les adultes différents, se retrouvent profondément blessées par ces discours et ces écrits qui circulent abondamment dans les médias sociaux, dans des livres, dans des conférences, dans des organismes, etc. Ces personnes sont blessées dans leur estime de soi, dans leur confiance, dans leur intégrité et dans leur valeur en tant qu’être humain. 

Les parents qui traversent cette étape en exprimant ainsi leurs émotions s’en trouvent également blessés. Cette expression des émotions n’est nullement libératrice pour le parent et entrave le processus d’acceptation ainsi que le début d’une relation épanouissante avec son enfant.  

La responsabilité face à ces écrits en plus que considérable. Il est possible d’exprimer authentiquement ses émotions de manière non-violente et de manière responsable. Et malheureusement, dans la majorité des cas, ce n’est pas fait. 

Les émotions sont criées et lancées, sans tenir compte des autres et des répercussions. On s’attend à ce que nos enfants agissent avec empathie et qu’ils expriment leurs émotions dans le respect d’autrui et de l’autre côté, nous nous permettons d’exprimer nos émotions avec impulsivité de manière non réfléchie. 

Il est essentiel de revoir nos attentes personnelles face à nos enfants. Ce n’est pas la différence qui est au cœur de la problématique mais bien nos espoirs, nos convictions et nos croyances qui sont bouleversés. NOS attentes personnelles sont chamboulées. Jeter le blâme sur la différence semble plus facile et acceptable que de revoir notre vision sur la vie et que de poser un regard conscient sur soi.  

La clé, c’est moi. Tout ce que j’imagine pour mon enfant, je l’imagine. Voici un truc. J’écris sur un papier tout ce que je veux pour mon enfant. Une fois terminé, je relis pour être bien certain de ne rien avoir oublié. J’ajoute ce que j’ai oublié. Voilà, c’est parfait, je sais tout ce que je veux pour mon enfant. Et ensuite, je regarde mon papier et je l’applique à moi-même. Le bien que je veux pour mon enfant, c’est tout simplement le bien que je veux pour moi. Autant m’occuper de moi tout de suite plutôt que de passer par mon enfant pour me satisfaire, moi. Ce qui ne me satisfera pas puisque c’est moi qui est insatisfait.

Jean-Pierre Lepri

Avoir un enfant peut s’avérer plus difficile que l’on croyait au départ et nous avons le droit de l’exprimer. Exprimons nos émotions à la première personne du singulier. 

‘‘Lorsque que tu t’opposes à moi, lorsque je t’aide à traverser plusieurs tempêtes émotionnelles, lorsque je passe des heures à te bercer, lorsque la nuit, tu demeures éveillé, JE me sens impuissante, JE me sens épuisée, JE trouve cela difficile. Mes attentes en sont complètement bouleversées. J’ai peur. MES compétences parentales sont constamment remises en doute.’’ 

Ce long processus de deuil que vivent certains parents est également un processus d’amour envers son enfant. Lorsqu’un parent ne parvient pas à accepter son enfant tel qu’il est, il y a quelque chose en soi qui nous empêche de respecter l’autre en tant qu’individu unique et indépendant. Il est alors impossible d’aimer pleinement et les deux parties en souffrent énormément.

Mieux vivre avec son enfant commence d’abord par mieux vivre avec soi-même. Nous avons tous le pouvoir de devenir le parent que vous rêvons d’être. 


Mélanie Ouimet

Les crises sont nécessaires!

Les crises sont nécessaires!

Les crises ont une connotation bien négative et tout être humain enclin à ces comportements est souvent jugé par la société, voir méprisé. Les parents ayant un enfant qui fait une crise en public sont également jugés sévèrement et surtout, injustement. 

Je vous propose de pousser la réflexion un peu plus loin que la simple observation d’un comportement et ainsi, essayer de changer la perception péjorative du mot crise. 

Par définition, une crise est une rupture d’équilibre. La crise a alors une fonction vitale pour les êtres humains, soit de rétablir l’équilibre émotionnel interne. 

Les crises sont le résultat d’une accumulation de tension insoutenable. Un grand bouleversement émotionnel déstabilise la personne. Cette tempête émotionnelle s’impose à elle. C’est le chaos à l’intérieur de soi. 

Lorsque la crise s’exprime, la tension s’évacue. Ce sont par des manifestations parfois bruyantes, parfois silencieuses qu’un individu espère faire entendre sa souffrance par son entourage pour ainsi pouvoir retrouver son bien-être. 

Dans notre société, nous avons tendance à favoriser les émotions calmes. Les crises (les surcharges en autisme) sont irritantes et troublantes et difficiles à accueillir. Les émotions, bien que souvent réprimer dans notre société, sont nécessaires.  Les émotions font peur, les fortes émotions à l’état pures effraies. Pourtant, plus nous accompagneront un individu tôt dans l’enfance dans ces moments de crises intenses, plus ce dernier les apprivoisera. Plus nous l’aideront à mettre des mots sur les déclencheurs et sur les émotions ressentis, plus la personne sera en mesure de comprendre ses émotions et de les gérer et n’en saura plus effrayée. 

Les crises ne doivent pas nécessairement être perçues comme un moment négatif. Nous avons tendance à confondre sentiments et émotions. Une émotion est physiologique et comprend trois phases : charge, tension, décharge. C’est la décharge qui permet à la personne de se soulager. Ce que l’on nomme « crise » est le processus de décharge émotionnel. Nous demandons à l’enfant ou l’adulte de se calmer, mais en fait, c’est justement la crise en soi qui calme la personne. 

C’est la crise qui calme la personne!

Il ne faut jamais banaliser une crise même si les événements déclencheurs semblent futiles. Jamais ne nous devons juger les émotions ou la sensibilité sensorielle d’autrui. Ce qui semble exagération pour une personne est vécu différemment pour une autre.

Ainsi, lorsque nous accompagnons la personne en accueillant son émotion, en l’écoutant et en laissant toute la place à l’expression de ce qu’elle vit intérieurement, nous l’aidons à bien vivre ce moment et à apprivoiser ses émotions. Nous lui permettons de ne plus être effrayée et submergée par ses émotions. Nous l’aidons à gérer son anxiété.  Nous aidons l’enfant à faire face à ses émotions et ses impulsions. Nous lui donnons des outils pour mieux gérer ces tempêtes et ses émotions envahissantes. Graduellement, nous favorisons les bonnes connections neuronales dans son cerveau qui lui permettrons de faire face aux situations de la vie de manière plus sereine non plus en se laissant envahir mais bien en traversant avec confiance ses émotions. Nous lui permettons de mieux se connaître ce qui lui donnera des outils également pour mieux gérer les surcharges sensorielles. Il apprendra à reconnaître les déclencheurs et connaîtra ses limites. 

Il ne faut pas avoir honte que notre enfant fasse une crise en public, même si le regard des autres semble nous mépriser. Entrez dans une bulle avec votre enfant et oublier l’extérieur. Accompagnez-le avec confiance et douceur. À ce moment, il n’existe que vous et lui. Faites-vous confiance. Vous savez ce dont votre enfant a besoin. 


Mélanie Ouimet

Colère et opposition : l’importance de l’éducation non violente

Colère et opposition : l’importance de l’éducation non violente

Nous sommes souvent dépourvus face aux comportements d’opposition et de colère de nos enfants. Nous prenons souvent ces comportements comme étant dirigés contre nous ou encore comme une désobéissance volontaire de l’enfant. 

Ainsi, notre propre réactivité nous amène à adopter une attitude autoritaire et menaçante. Parfois nous punissons, parfois nous faisons du chantage dans le but que notre enfant obéisse ou agisse « bien ». 

Nous entrons alors dans une lutte de pouvoir. Le parent étant la personne autoritaire qui cherche à « dominer » l’enfant et punir ses comportements. De son côté, l’enfant cherche son identité et s’affirme fortement. Il cherche également et surtout, l’approbation et l’amour de ses parents. On entre alors dans un cycle vicieux et surtout, pernicieux pour la relation parent-enfant.

Aucune punition n’est éducative !

Les punitions et l’autorité induise la colère chez l’enfant et incite les « mauvais comportements ».  

Nous sommes inconsciemment conditionnés à des méthodes éducatives punitives. Lorsqu’un enfant a un comportement « désobligeant », nous cherchons immédiatement à punir ce comportement plutôt qu’à essayer de trouver la cause du comportement et de trouver des stratégies qui favoriseront la réflexion chez l’enfant qui le fera grandir. 

Quand nous sommes face à des comportements difficiles, en tant que parents, nous devons souvent faire preuve de créativité pour trouver des moyens concrets qui soit ni punitifs, ni violent, ni excluant. Cela n’est pas une tâche facile. D’autant plus que les attitudes de nos enfants peuvent nous confronter à de multiples égards.  

Un enfant a besoin d’un cadre. Un cadre est sécurisant pour un enfant. Il est donc important de dire « non » lorsque vous le jugez nécessaire. L’enfant, quant à lui, peut exprimer son mécontentement face à ce refus. En tant que parent, nous pouvons simplement être à l’écoute de sa peine, sa déception, sa colère. L’enfant s’affirme, parfois plus vivement et férocement, mais chaque émotion qu’il ressent est légitime et nous devons accorder de l’importance à son ressenti, sans le minimiser, sans le nier. 

Lorsque, suite à un refus, l’enfant entre dans une grosse crise de colère et d’opposition, il faut garder en tête qu’il n’a pas le contrôle sur les émotions qui l’envahissent.

L’enfant est complètement submergé par ses émotions. Son comportement n’est pas volontaire, ni dirigé contre vous. Il essaie de retrouver son calme intérieur et il n’a pas de mots pour exprimer sa grande frustration, sa peine, sa déception. Le comportement est l’expression maladroite de son émotion. Est-ce qu’on songerait à punir quiconque parce qu’il ressent une émotion? 

Même chez un enfant plus âgé qui s’exprime bien, il peut être difficile de trouver les mots pour exprimer ce qu’il ressent. Quand un enfant crie et nous insulte verbalement, il exprime de la détresse. Il n’essaie pas de rendre « à bout » le parent.  L’attention qu’il recherche chez son parent n’est pas à proscrire. 

Souvent, nous avons tendance à dire que notre enfant recherche de l’attention négative en adoptant des comportements désagréables. Notre premier réflexe est de nous braquer, de nous montrer ferme et surtout, de ne pas céder à notre enfant. 

Pourtant, l’attention est un besoin essentiel pour un enfant.

Un enfant qui est violent verbalement, qui s’oppose ou qui est rempli d’amertume et de colère a généralement un grand besoin de reconnaissance et de valorisation. Il a besoin de sentir qu’il est important pour son parent. Il a besoin de se sentir apprécié et aimé. 

Plus un enfant recherche l’attention négative, plus c’est signe d’une grande carence et d’une faible estime de soi !

Bien qu’il soit difficile de se montrer calme et empathique, c’est bien à ce moment précis que l’enfant a le plus besoin de l’attention, de l’écoute et de l’amour de ses parents. 

Quand on base notre relation parent-enfant sur la confiance plutôt que sur une relation autoritaire, c’est tout notre vision éducative qui change. Quand on mise sur la relation d’égal à égal, nous ne sommes plus dans l’attente que notre enfant obéisse sur le champ à nos ordres ou à nos demandes. Nous cheminons et nous grandissons avec lui, à ses côtés. Cet accompagnement bienveillant est un travail de long terme. 

Aider un enfant à grandir, c’est l’accompagné au quotidien et non lui apprendre à se soumettre.  


Mélanie Ouimet