Le dépistage génétique en autisme : vers l’eugénisme ?

La recherche pour identifier les gènes impliqués dans la condition autistique existe depuis plusieurs années déjà. Au cours des dernières années, la science a découvert plusieurs gènes impliqués dans cette condition. La science progresse et c’est fascinant. 

Cependant, l’objectif de ces recherches est douteux et affolant : éliminer l’autisme ! 

À l’heure actuelle, on propose aux autistes qui souhaitent devenir parent ou aux parents d’enfants ayant déjà un enfant autiste de passer des tests génétiques afin de savoir les probabilités d’avoir un enfant autiste. 

On semble trouvé cela normal. Personne ne semble se préoccuper du côté éthique de tels tests. Comment pouvons-nous décider de la vie d’un être humain ainsi? Sous quel prétexte ? Notre propre opinion personnelle ? Nos propres croyances ? Notre propre bagage de vie ? Qui sommes-nous pour dire que les autistes sont inférieurs et indignes de vivre ? Sur quoi nous basons-nous pour affirmer que l’autisme est une intelligence à éradiquer ? 

Personne ne semble se préoccuper de la souffrance que peut engendrer de tels tests sur les autistes eux-mêmes. Le message qu’on envoie aux autistes est clair : La société ne veut pas de gens comme vous. Vous êtes anormaux et vous êtes un fardeau pour votre entourage. 

Comment est-ce possible en 2018 que des êtres humains puissent se réjouir de tels tests de dépistages ? Comment est-ce possible que personne ne s’insurge ? Comment est-ce possible en tant que société d’accepter que l’on puisse éliminer des êtres humains sous prétexte qu’ils soient… différents ? 

Un enfant n’est pas une marchandise qu’on achète au magasin. Un bien matériel que l’on prend soin de choisir selon nos goûts, nos préférences, nos attentes. Modeler un enfant afin qu’il soit tel que nous l’avions imaginé sert nul autre que de combler des besoins irréels, des besoins qui ne sont pas celui de l’enfant à naître. Il est impossible de prédire l’avenir qu’aura notre enfant et il est impossible de le préserver des épreuves qu’il rencontrera en cours de route et ce, même si nous aurions prédéterminé toutes les caractéristiques physiques et intellectuels de notre enfant. Ainsi, qui sommes-nous pour savoir, choisir et décider quelles caractéristiques seraient mieux pour un enfant à venir ? 

Par ailleurs, nous négligeons des facteurs primordiaux dans cette recherche génétique. Un de ces principal facteur est que les chercheurs font un amalgame avec l’autisme et les syndromes génétiques. Ces deux conditions ne sont que très rarement distinguée, et pourtant, elles sont extrêmement différentes. 

Lorsque nous voyons des recherches circulées sur l’autisme et la génétique, nous pouvons aisément constater que les gènes pointés du doigt ne sont pas liés à l’autisme mais bien à différents syndromes. Des syndromes génétiques tels que, le x fragile, la sclérose tubéreuse, le syndrome de Cowden, le syndrome de Rett, le syndrome d’Angelman, le syndrome de Timothy, la neurofibromatose, sont des conditions génétiques rares. Ils n’ont rien à voir avec l’autisme, c’est-à-dire, que ces personnes n’ont pas de fonctionnement perceptif, cette autre forme d’intelligence. 

Par exemple, dans une étude récente réalisée par des chercheurs de l’Université McGill à Montréal, nous pouvons lire :

« Les troubles du spectre de l’autisme forment un ensemble de centaines de maladies très rares, causées par des mutations dans de nombreux gènes

Le groupe de scientifiques a concentré ses recherches sur un gène nommé GRIN2B, connu pour causer l’autisme lorsqu’il subit une mutation.

Par génie génétique, ils ont réussi à corriger en laboratoire la mutation affectant les cellules du patient, et à les faire redevenir saines. »[1]

Tout d’abord, une première erreur grossière démontre cet amalgame entre autisme et syndrome. L’autisme ne forme pas un ensemble de centaines de maladies très rares et la condition n’a aucune mutation ! 

Lorsqu’on parle d’autisme, il n’y a aucune altération génétique. L’autisme est une prédisposition génétique que nous pouvons avoir dans notre phénotype et donc, transmettre à nos enfants ou non, selon plusieurs facteurs qui entrent en jeu. Au niveau génétique, nous pourrions comparer l’autisme à toutes autres caractéristiques humaines, telle la couleur de yeux, de cheveux, de peau. Bien que différent, aucun de ces traits n’est pathologique. 

Lorsqu’on parle de syndrome génétique, il y a des altérations génétiques fréquentes, des mutations fréquentes. Dans certains cas, ces syndromes sont aussi dégénératifs.

Certains comportements observables peuvent sembler se ressembler entre l’autisme et certains de ces syndromes : langage tardif, écholalie, évitement du contact visuel, mouvements répétitifs, hypersensibilité aux stimuli, anxiété, agressivité, etc. 

En autisme, ces comportements sont souvent mal compris et donc mal interprétés. Lorsque nous connaissons bien l’autisme, nous savons que ces comportements sont en lien avec le cerveau perceptif et font soi parti du développement normal et de la personnalité de la personne ou ils ont une source explicable et que l’environnement peut être amélioré en conséquence (anxiété, agressivité, opposition, automutilation). 

La recherche, peu importe le domaine, est importante. Elle permet d’améliorer les connaissances, de mieux comprendre, d’évoluer. 

Je crois par contre qu’il est nécessaire de s’interroger sur les motifs lorsqu’on fait de la recherche en génétique. Lorsque ces dites recherches ont pour objectifs le dépistage précoce d’un variant humain…le chemin nous conduit tout droit vers l’eugénisme de celui-ci, en l’occurrence, l’autisme, une autre forme d’intelligence indispensable à l’humanité. 


Mélanie Ouimet


[1] http://www.journaldemontreal.com/2018/06/26/autisme–nouveau-mecanisme-trouve-par-des-chercheurs-montrealais

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